cybergrunge, le blog

Le réchauffement climatique, le journaliste, la thermodynamique et l’opinion publique

Ouh, mais ça fait longtemps que je n’avais rien publié. Râlons un peu pour relancer la machine.

Ce matin, une collègue tout juste rentrée de vacances :

Nous on est partis en Espagne avec le camion. Et toi t’as bougé ?
— Non, on est restés là.
— Ah ouais, au chaud quoi 😅
— Bah tu sais on a la clim dans l’appart, donc on était à l’abri.
— Aaaaah, je vois, c’est toi le réchauffement climatique en fait 😁

Bon, de la part de cette collègue, je sais que ce n’était qu’une blague.

MAIS.

Le simple fait que cette blague lui soit venue spontanément, alors même qu’elle venait de me dire qu’elle avait parcouru 1000 kilomètres dans un van et que je venais de lui dire que je n’en avais parcouru aucun, en dit long sur l’opinion publique à propos de la climatisation.

Quelques mises au point s’imposent.

Le réchauffement climatique

Ouaip, c’est la merde.

Le journaliste et la thermodynamique

Le froid contre le chaud

Tout l’été, j’ai vu passer des articles ventant la technique du bol de glaçons devant le ventilateur, afin de se passer de climatisation car celle-ci contribue au réchauffement climatique (passons poliment sur le fait que le journaliste n’a toujours pas compris que la climatisation en France marche à l’uranium et n’a donc que très peu d’impact en termes d’émission de gaz à effet de serre) et à l’effet d’îlot de chaleur urbain.

On ne fabrique pas du froid. Jamais. C’est impossible. Cela reviendrait à violer les lois de la thermodynamique, et par là même les fondements de notre réalité, y compris l’écoulement du temps dans le sens passé-présent-avenir. Ben ouais.

On ne peut que déplacer de la chaleur. Une climatisation concentre la chaleur présente dans l’air, et l’évacue vers l’extérieur. Voilà pourquoi elle ventile de l’air chaud à l’extérieur en plus de ventiler de l’air froid à l’intérieur.

Un congélateur fait exactement la même chose, sauf qu’il ventile la chaleur à l’extérieur de son compartiment, mais pas à l’extérieur du bâtiment. Toute la chaleur évacuée du congélateur se retrouve donc dans le logement. Chaleur dont on essaye de se protéger avec un bol de glaçons. Glaçons dont la fabrication a nécessité une augmentation de la température du logement. Etc.

Trollface dans un bateau, tenant une perche munie d’un aimant pour faire avancer le-dit bateau également équipé d’un aimant. « Problem ? » demande-t-il.

Il n’y a aucun avantage écologique à la technique du bol de glaçon par rapport à une climatisation. Au contraire même, puisque l’efficacité négative de cette technique va pousser à une fuite en avant consistant à fabriquer encore plus de glaçons.

Le chaud contre le froid

Savez-vous quelle technologie, en revanche, n’est jamais pointée du doigt par le journaliste, et ce parce qu’elle est parée des plus hautes vertus écologiques ? La climatisation.

Ah non, pardon, la pompe à chaleur.

Ah non, pardon, en fait c’est exactement le même appareil.

Un système de chauffage par pompe à chaleur concentre la chaleur présente dans l’air, et l’évacue vers l’intérieur. Voilà pourquoi elle ventile de l’air froid à l’extérieur en plus de ventiler de l’air chaud à l’intérieur.

Et voilà pourquoi les pompes à chaleur sont réversibles : elles font chauffage en hiver, et climatisation en été.

L’opinion publique

L’hiver prochain, justement, s’annonce rude. Non que les prévisions météo soient déjà disponibles, mais on sait déjà qu’on ne pourra pas se chauffer avec le gaz russe.

En fait, c’est plutôt une bonne nouvelle, puisque ça va permettre à plein de gens de comprendre qu’il faut se passer de combustibles fossiles. Les pompes à chaleur vont sans doute connaître un boom d’installations, soutenu par les aides gouvernementales.

Qui osera remettre en question l’avancée écologique de ces installations ? Les mêmes qui ont critiqué leur utilisation cet été ? On parle pourtant bien du même appareil : une pompe à chaleur. On parle pourtant bien du même usage : le confort thermique du logement. On parle pourtant bien des mêmes impacts : consommation d’électricité et création d’îlots de chaud ou de froid (pendant une période où l’on souhaite se prémunir contre l’un ou contre l’autre) dans les zones densément équipées.

Avec une différence toutefois : en hiver on peut enfiler un pull, en été on ne peut pas ôter sa peau.

Mais cet été, pour l’opinion publique, c’est ma pompe à chaleur nucléaire qui était coupable du réchauffement climatique, quand je restais chez moi au lieu de brûler de l’essence.

Mais cet hiver, pour l’opinion publique, c’est ma pompe à chaleur nucléaire qui sauvera le monde du réchauffement climatique.

🤷